Quels sont les mots à dire, les gestes à avoir et les choses à ne surtout pas faire quand on est avec une personne anxieuse ? Guide de survie du conjoint souhaitant bien faire.
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Vivre au quotidien avec quelqu'un d'anxieux peut s'avérer compliqué, voire, dans les cas les plus extrêmes, handicaper la relation. Pour éviter d'en arriver là, le médecin psychiatre Jean-Luc Ducher, auteur de Vaincre son anxiété par soi-même (1), partage ses recommandations pour réussir à maintenir sa vie de couple avec un partenaire un brin stressé.
Avant tout, reconnaître le profil
En matière d'anxiété, il existe deux catégories. Celle considérée comme «normale», comprenez sans conséquence trop importante, et celle dite pathologique. Une personne se trouve dans la seconde catégorie, «lorsque l'anxiété devient envahissante et qu'elle est pénible à supporter», indique Jean-Luc Ducher.
Différentes manifestations sont identifiables. D'abord, le trouble d'anxiété généralisée (TAG), lorsqu'une personne se fait beaucoup de souci sans raison, ensuite le trouble panique, caractérisé par des crises d'angoisse aiguës, le trouble phobique, qui entraîne des peurs dans différents domaines, et enfin le trouble obsessionnel, qui induit des comportements répétés pour se rassurer.
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Ne pas servir de "médicament"
Dans le cas d'un anxieux social qui a des difficultés à communiquer et qui ne réussit pas par exemple à passer un coup de téléphone, le conjoint sert alors d'atténuateur, de médicament. «Au départ, cela peut être valorisant parce qu'on a l'impression de lui être utile, mais au bout d'un moment, cela peut être très lourd à supporter», indique le psychiatre Jean-Luc Ducher. La clef ici est de ne pas entrer dans le système anxieux. Mieux vaut ne pas non plus faire l'effort à la place du partenaire.
Inutile d'arrêter d'aider l'autre à faire certaines tâches du quotidien, «il y a toujours des choses que l'on sait plus facilement faire par habitude, et qui nous posent moins de problème. En revanche, si c'est systématique, on rentre dans un fonctionnement pathologique qui va entretenir l'anxiété de l'autre», met en garde le médecin.
Ne pas jouer au psy
L'adulte anxieux est peut-être quelqu'un qui durant l'enfance a été "surcouvé" par ses parents
Ce n'est pas parce que l'on aime son partenaire qu'on peut le guérir en devenant son thérapeute. Jean-Luc Ducher avertit que cela risque même de compliquer le couple, en entraînant une relation de «soignant-soigné et non plus d'amant-amant ou d'aimé-aimé».
Ne pas materner
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, surprotéger a tendance à favoriser l'anxiété. «L'adulte anxieux est peut-être quelqu'un qui durant l'enfance a été "surcouvé" par ses parents. Si vous avez un petit à qui vous ne cessez de dire "habille-toi bien", "ne prends pas froid", "ne t'enrhume pas", vous envoyez des signaux de dangerosité», développe le Dr Ducher. Ces derniers conditionnent automatiquement l'enfant à s'inquiéter. Arrivé à l'âge adulte, il garde ce schéma.
Lui suggérer des pistes pour arrêter d'envisager le pire
Si le partenaire se fait du souci pour tout et rien, et qu'il est facilement sujet aux scénarios catastrophes, il est judicieux de lui proposer d'autres alternatives. Il ou elle imagine le pire parce qu'une personne qui devait l'appeler ne l'a pas encore fait ? Proposons-lui d'autres pistes qui pourraient expliquer l'absence d'appel : un besoin de repos ou des embouteillages. «Il faut amener l'anxieux à considérer le scénario catastrophe comme une hypothèse possible, mais pas la seule. Plus j'ai de scénarios alternatifs, moins j'ai de conviction que le premier auquel j'ai pensé soit le bon», explique le psychiatre.
L'inciter à respirer calmement
Si notre conjoint(e) fait régulièrement des crises d'angoisse et que notre présence ne suffit pas à l'apaiser, on peut l'inviter à respirer calmement. «Lors d'attaques de panique (des crises d'angoisse aiguës où les anxieux ont l'impression qu'ils deviennent fous ou qu'ils peuvent mourir, NDLR), la respiration joue un rôle important, les personnes respirent très vite et mal», développe Jean-Luc Ducher.
Prendre du recul
On peut guérir de l'anxiété. Le problème est qu'il ne faut pas la laisser se développer
«Si vous-même vous angoissez, vous allez renforcer la situation. Vous renvoyez une image à l'anxieux qui se dit "si mon conjoint s'angoisse, c'est que j'ai raison de m'angoisser"», souligne le psychiatre. Pour cela, il faut prendre une certaine distance. «Il est important de prendre du recul pour permettre à l'anxieux de voir en nous un repère, quelqu'un qui est dans la situation mais qui n'angoisse pas», expose Jean-Luc Ducher.
Faire attention à la contamination
D'une part, «si j'ai moi-même tendance à me faire du souci mais que je le gère correctement, et que je suis avec une personne anxieuse, cette dernière risque de me "contaminer" et d'aggraver mon état», décrit Jean-Luc Ducher.
Attention d'autre part à ce que le conjoint anxieux ne nous transfère pas son ressenti pour se libérer lui-même. «Le conjoint est utilisé comme médicament. Dans ce système, il transmet ses soucis à l'autre», prévient le psychiatre.
Lui conseiller de consulter un professionnel
Enfin, une des meilleures solutions lorsque la situation devient difficilement gérable et vivable est de l'inciter à consulter un professionnel, psychologue ou psychiatre. «On peut guérir de l'anxiété. Le problème est qu'il ne faut pas la laisser se développer. Plus on attend, plus ce sera long», souligne Jean-Luc Ducher.
(1) Vaincre son anxiété par soi-même, de Jean-Luc Ducher, Éd. Odile Jacob
Agathe Hakoun