17 morts depuis janvier : pourquoi la coqueluche explose en France.
Au moins 17 morts, dont 14 enfants, depuis janvier. Le bilan de cette maladie respiratoire, extrêmement contagieuse, s’aggrave de mois en mois. Un phénomène observé dans toute l’Europe.
En Auvergne-Rhône-Alpes, dans le Berry, en Lorraine… partout, c’est l’alerte. La coqueluche, maladie que l’on croyait pourtant éradiquée, est en pleine recrudescence en France, et elle tue.
Elle a causé le décès de 14 enfants depuis janvier, selon les données publiées le 28 juin par Santé publique France (SPF). Au 26 juin, « un total de 17 décès a été retrouvé. Parmi eux, 3 adultes (dans 2 régions) et 14 enfants de moins de 5 ans (répartis dans 7 régions) », détaille l’établissement public dans son bilan épidémiologique.
Onze fois plus de cas en cinq mois que sur tout 2023
Selon SPF, 12 des 14 enfants victimes de cette infection respiratoire étaient des nourrissons âgés d’un à deux mois. Un enfant de 4 ans est aussi décédé, tandis qu’un dernier, d’un mois, « n’avait pas la coqueluche indiquée comme cause de décès en l’état, mais avait été hospitalisé pour coqueluche quelques jours avant ».
De son côté, SOS Médecins a signalé récemment une augmentation (18 %) des actes due à des cas de coqueluche dans toutes les classes d’âge. L’Institut Pasteur, quant à lui, rapporte « plus de 5 500 cas positifs sur les cinq mois de janvier à mai ». Soit un nombre 11 fois plus élevé que sur toute l’année 2023 et plus important que durant chaque année pré-Covid (3 200 lors du dernier pic, en 2017).
Depuis le début de l’année, une vingtaine de foyers d’infection ont été identifiés dans 8 régions de l’Hexagone alors que, l’année dernière, à la même époque, deux cas groupés seulement avaient été identifiés dans une seule région.
Santé publique France le rappelle : cette maladie respiratoire d’origine bactérienne est extrêmement contagieuse (une personne malade peut contaminer en moyenne 15 à 17 personnes), elle se transmet très facilement par voies aériennes et peut se révéler grave, voire mortelle chez les personnes fragiles, en particulier les personnes âgées, les femmes enceintes et les bébés de moins de 6 mois encore non protégés par la vaccination.
Une couverture vaccinale insuffisante, notamment chez les adultes
La vaccination, c’est justement là où le bât blesse. Car, l’insuffisante couverture vaccinale est bien en cause. Il faudrait « revacciner à l’âge adulte, en particulier les femmes enceintes » pour protéger les futurs bébés car « le vaccin actuel ne protège pas à vie contre l’infection », précise le microbiologiste Philippe Sansonetti.
Si la primo-vaccination chez les enfants est obligatoire depuis 2018 à l’âge de 2 mois, 4 mois et 11 mois avec un rappel à 6 ans et un autre entre 11 et 13 ans, depuis 2022, elle est préconisée durant la grossesse (entre 20 et 36 semaines d’aménorrhée) pour protéger le nouveau-né avant sa propre vaccination.
Car, en France, la contamination se fait via les adultes, qui contaminent les bébés trop jeunes pour être vaccinés. Faut-il le rappeler ? La coqueluche – qui se caractérise par des quintes de toux, de la fièvre, un effondrement immunitaire et une extrême fatigue – n’a jamais vraiment disparu.
« Il y a des cycles de quelques années, parfois quelques décennies, où les maladies se font oublier, mutent un peu, puis réapparaissent sans prévenir », explique le directeur en sciences médicales Mikael Askil Guedj. Ce qui fait craindre à Santé publique France « une reprise de la circulation de la bactérie en communautaire qui pourrait s’intensifier dans les prochains mois ».
Une conséquence du Covid… et de la météo pourrie
Autres explications : la faible exposition aux agents pathogènes pendant le Covid. Et aussi, durant la pandémie, des médecins peu accessibles, des coupures scolaires qui ont perturbé le cycle vaccinal des enfants par des retards dans les rappels.
Enfin, le nivellement des saisons provoqué par le dérèglement climatique a plongé le pays dans une sorte d’automne perpétuel depuis janvier. L’humidité présente dans l’air favorise la circulation des virus respiratoires via les gouttelettes d’eau.
Cette recrudescence de la coqueluche se vérifie aussi en Europe, avec 32 000 cas rapportés entre janvier et mars contre 25 000 sur toute l’année dernière, pointe un rapport du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), publié fin mars.
Au Royaume-Uni, par exemple, le gouvernement s’inquiète de la faible vaccination des femmes enceintes et des adultes, alors que 52 nourrissons de moins de 3 mois ont été infectés par la maladie en janvier et en février 2024, contre 2 en 2022 et 48 en 2023.
Pour l’ECDC, « l’augmentation actuelle est potentiellement liée à une circulation plus faible pendant la pandémie de Covid, combinée à un taux de vaccination sous-optimal dans certains groupes pendant la pandémie ».
Source : https://www.humanite.fr/