Capitaliser sur l’adaptation des systèmes de surveillance lors de la pandémie de COVID-19
Cinq ans après le début de la pandémie de Covid-19, Santé publique France et des équipes académiques associées décrivent dans un numéro bilan du Bulletin épidémiologique hebdomadaireles progrès techniques qui ont été réalisés en pleine urgence sanitaire dans les systèmes d’information et de surveillance. « Les répercussions (…) dépassent largement les enjeux strictement liés au virus et vont bien au-delà des conséquences possibles à long terme d’infections individuelles », soulignent Laëtitia Huiart et Caroline Alleaume dans l’éditorial, insistant sur l’ambition que se doit d’avoir la France en matière de systèmes d’information pour prévenir et endiguer les conséquences des futures crises sanitaires. L’approche qui prévaut doit être désormais plus globale, avec une conscience accrue des risques, et doit capitaliser sur leurs enseignements tirés de la gestion de la crise et des nombreuses initiatives qui en ont émané.
2020 : les énormes progrès réalisés dans l’urgence
Dès le début de la pandémie, des outils de suivi et d’information ont dû être bâtis pour collecter les données scientifiques, orienter la décision politique et informer le public sur cette crise sans précédent. Des briques éparses existaient auparavant, mais il faut reconnaître les défis techniques alors relevés par les agences et services de santé : le premier enjeu a été de collecter et analyser d’énormes volumes de données – voulues quasi exhaustives – sur l’ensemble du territoire, notamment pour mieux comprendre la circulation du virus et de ses variants. À partir de ces données, il a fallu produire des indicateurs fiables en quasi-temps réel, indispensables aux prises de décisions médicales et politiques. Ces deux défis ont été rendus d’autant plus difficiles qu’il fallait agréger des données issues de sources et de systèmes différents, et qu’il fallait en assurer le suivi longitudinal, ce qui nécessitait « un chaînage entre les données issues des différents systèmes permettant, par exemple, de suivre les multiples tests effectués par chaque individu, d’étudier les liens entre l’infection et la gravité de la maladie en fonction des variants impliqués ou du statut vaccinal », tout en conservant l’anonymat.
La pandémie a eu un impact significatif sur le développement de l’open data en santé
Système VAC-SI de suivi des vaccinations, données ESMS relatives aux établissements médico-sociaux, données SurSaUD relatives aux urgences et décès ou encore SI-VIC concernant les victimes d’attentats et les situations sanitaires exceptionnelles sont quelques exemples des nombreux systèmes de suivi qui ont été activés et adaptés (créations de codages spécifiques au COVID-19) pour piloter au plus près la crise sanitaire. Certains ont même été créés comme les systèmes de surveillance des résultats des tests biologiques, celui de suivi du déploiement de la campagne vaccinale ou encore le SI-DEP (Système d’Information de DEpistage Populationnel). Ce dernier a vu le jour en mai 2020 avec près de 5 000 laboratoires privés et publics raccordés et près de 40 000 résultats de tests collectés par jour. En janvier 2022, ce chiffre était de 2,7 millions de tests par jour.
À des problématiques évidentes de stockage de données se sont adjointes les difficultés techniques de leur traitement. À ce titre, la France disposait déjà d’un outil unique en Europe – le Système national de données de Santé (SNDS) – qui a été précieux durant cette période. C'est à travers une logique d’open data, données ouvertes et accessibles à tous, que des supports et outils d’information ont pu exploiter les données recueillies pour être mises à disposition de la population : applications TousAntiCovid, CovidTracker, sites d’actualités grand public comme Le Monde…
Et maintenant ? Au-delà de la pandémie, la question de la convergence et de l’interopérabilité des bases de données est devenue une préoccupation qui dépasse le seul domaine des maladies transmissibles. Il faut « une approche intégrée de la surveillance, coordonnée nationalement et internationalement, [qui] favorise une vision holistique de la santé dans une perspective “Une seule santé” [One Health], englobant les dimensions humaine, animale et environnementale, et ce, au-delà des frontières », plaident Céline Caserio-Schönemann (Santé publique France) et ses co-auteurs, en conclusion de perspectives. Avec trois enjeux en ligne de mire : prévention, réactivité et fiabilité de la parole scientifique et publique.
Cette ambition rejoint celle affichée par l’Union européenne dans un rapport du mois d’octobre dans lequel elle dresse un bilan des efforts considérables réalisés lors de la pandémie : soutien à la recherche, achèvement et acheminement d’un vaccin dans un temps record, mise en place d’un certificat à l’échelle de l’Union… Autant de pierres qui participeront de la construction d’une Union européenne de la santé et d’un Espace européen de la donnée de santé, accessible et sécurisé.
Source : https://www.univadis.fr/