Découverte d’un mécanisme d’antibiorésistance.
La bactérie Gram négatif Pseudomonas aeruginosa (bacille pyocyanique) est responsable de plus de 300 000 décès par an dans le monde. Elle a développé de nombreuses résistances aux antibiotiques. Les polymyxines (polymyxine B et colistine) conservent une certaine efficacité contre cette bactérie et sont utilisées en dernier recours. Cependant, certaines souches développent une résistance à cette classe d’antibiotiques. Cette résistance est due à la production par la bactérie d’une protéine particulière, CprA (cationic peptide resistance A). Une équipe française a réussi à identifier les mécanismes d’action de cette protéine, ouvrant une voie pour lutter contre l’antibiorésistance.
La protéine CprA est codée par le gène cprA, dont l’expression est déclenchée par la présence de colistine dans l’environnement de la bactérie. Cette protéine agit comme une enzyme de la famille des SDR (short-chain dehydrogenase/reductase) en modifiant les lipides de la membrane bactérienne. Celle-ci produit alors des microvésicules projetées vers la membrane des cellules de l’hôte et pénétrant dans son cytoplasme. Ces microvésicules ont trois propriétés :
- elles contiennent des substances toxiques pour la cellule-hôte ;
- elles provoquent un excès de la réponse inflammatoire intracellulaire innée (inflammasome) ;
- elles se lient aux lysosomes, entravant le mécanisme d’autophagie qui permet l’élimination des agresseurs de la cellule, dont Pseudomonas aeruginosa.
Cette explication a été confirmée sur un modèle de souris à qui ont été administrées des Pseudomonas aeruginosa modifiées pour ne pas produire la protéine CprA. Les bactéries étaient nettement moins virulentes. La production de CprA étant déclenchée par la présence de colistine, un traitement par cet antibiotique peut se révéler contre-productif.
D’autres bactéries produisent des protéines analogues à la CprA : certaines souches d’Escherichia coli, Yersinia pestis et Ralstonia solanacearum (responsable d’une grave maladie de certaines plantes, comme la pomme de terre et la tomate).
Pour ses auteurs, ce travail révèle une nouvelle famille de facteurs d’antibiorésistance chez les bactéries Gram négatives. Il ouvre la voie à des innovations thérapeutiques ciblant cette famille.
Source : https://www.univadis.fr/