Influenceurs médicaux : malédiction ou bénédiction ?
« Bonjour chers amis, je suis doctorante en médecine et je vous emmène aujourd’hui découvrir mon travail quotidien ! » C’est à peu près ce que pourrait être un message d’accueil sur Instagram. Les professionnels de santé peuvent être conscients de la grande différence entre « doctorante » et « médecin », mais les non-initiés peuvent être déconcertés.
Et le fait que le travail quotidien se déroule actuellement encore dans le cadre de l’année de stage à la fin des études n’est probablement pas clair pour tout le monde. Cependant, un tel accueil conduit à penser que la personne exerce une activité médicale et possède donc une expertise.
Le nombre d’« influenceurs » médicaux augmente. Le nombre d’utilisateurs des réseaux sociaux a également augmenté ces dernières années ; il est donc logique que les médecins utilisent également ces plateformes. Mais quels sont les avantages et les inconvénients de la diffusion de contenus médicaux sur les réseaux sociaux ?
Dangers potentiels des réseaux sociaux
La première grande difficulté liée à l’utilisation des réseaux sociaux est le respect de la vie privée des patients. Si des cas passionnants sont rapportés, cela intéresse les personnes du domaine médical et attire probablement l’attention. Toutefois, même si le nom n’est pas mentionné, les patients peuvent être reconnus. Il suffit parfois d’informations sur le type de cas du patient associées au moment de la présentation.
Une étude britannique s’est penchée sur le caractère identifiable potentiel des données des patients sur la base de publications sur Twitter. Les auteurs sont arrivés à la conclusion que, dans 32 % des cas, les amis ou la famille reconnaissaient leurs proches comme étant les patients (1, 2).
Un autre problème est celui des contenus non sensibles qui pourraient blesser les patients ou leurs proches. De tels incidents se produisent aussi bien avec les professionnels qu’avec les étudiants. Une étude menée aux États-Unis a interrogé 78 facultés de médecine sur les incidents au cours desquels des étudiants ont publié des contenus inappropriés sur les réseaux sociaux.
Pas moins de 60 % d’entre eux ont déclaré avoir déjà été confrontés à de tels incidents. Il s’agissait par exemple de photos de personnes ivres ou de contenus à caractère sexuel. Dans la plupart des cas, seul un avertissement a été prononcé. Dans 7 % des cas seulement, les étudiants ont été licenciés. Un autre exemple est celui de deux chirurgiens esthétiques australiens. Ils ont publié des contenus inappropriés de personnel qui, par exemple, dansait autour des patients pendant une liposuccion (1, 3).
Un autre exemple de problème. Quelqu’un qui est assis devant la caméra portant une blouse blanche et un stéthoscope est perçu comme une personne de confiance par la grande majorité des spectateurs. Il faut être conscient de cette responsabilité avant de publier une opinion. En effet, le personnel médical peut lui aussi commettre des erreurs et être source de malentendus, surtout si le sujet ne relève pas de son domaine de compétence (1).
Enfin, il y a les placements de produits. Ils représentent une possibilité de gagner de l’argent par l’intermédiaire des réseaux sociaux. En tant que médecin, l’objectif devrait être d’informer de manière impartiale sur les options possibles et de trouver ensuite une solution avec le patient grâce à ce que l’on appelle la « prise de décision partagée ». En revanche, dans le cas d’un placement de produit, on fait la promotion d’un produit et on profite de l’achat de « followers » (1).
Avantages possibles des réseaux sociaux
Malgré certains dangers potentiels, on peut tout à fait considérer les réseaux sociaux et la diffusion de contenus médicaux sur ceux-ci comme une opportunité.
Lors de la pandémie de coronavirus, alors que de nombreuses théories du complot circulaient sur internet, il était particulièrement important que les professionnels de santé expliquent ce qu’il en était avec des arguments basés sur les preuves. Le fait de fournir des explications impartiales et d’expliquer des faits complexes dans un langage simple peut offrir un énorme intérêt.
En effet, dans le quotidien mouvementé des hôpitaux et des cabinets médicaux, il n’y a souvent que peu de temps pour les explications. Une meilleure compréhension de sa propre maladie peut conduire à une meilleure observance (1).
En outre, les réseaux sociaux peuvent aider à montrer l’humanité derrière le métier ; les conditions de travail parfois extrêmement fatigantes, qui entraînent des taux élevés de burnout. L’humour est ici une stratégie d’adaptation importante, qui peut également être partagée par l'intermédiaire des réseaux sociaux. Les médecins peuvent ainsi se mettre en réseau et se soutenir mutuellement (1).
De même, des médecins de différentes spécialités peuvent donner un aperçu réaliste de leur travail quotidien et aider ainsi de futurs collègues à se décider à devenir médecins spécialistes.
Conclusion et recommandations d’action
L’utilisation des réseaux sociaux va probablement continuer à augmenter au cours des prochaines années. Comme nous l’avons montré ci-dessus, la diffusion de contenus médicaux peut être tout à fait instructive et, en outre, créer des réseaux d’échange. Cependant, les inconvénients ne doivent pas être négligés.
Source : https://www.univadis.fr/