Est-ce le remède contre la gueule de bois que l’on attendait ?
Avec ses maux de tête lancinants, sa fatigue accablante et ses nausées tenaces, la gueule de bois est une expérience que beaucoup préféreraient éviter. Pourtant, malgré des décennies de recherches et d’innombrables remèdes plus ou moins efficaces, il n’existe toujours pas de solution miracle. Cela pourrait cependant bientôt changer. Une équipe de chercheurs de l’ETH Zurich a en effet mis au point un hydrogel révolutionnaire capable de neutraliser l’alcool directement dans le système digestif, empêchant ainsi ses effets délétères sur l’organisme. Cette avancée pourrait bien bouleverser notre rapport aux boissons alcoolisées et leurs conséquences.
Un hydrogel qui bloque l’alcool avant qu’il ne fasse des ravages
Contrairement aux méthodes classiques qui tentent de traiter les symptômes après coup, cet hydrogel fonctionne en empêchant l’alcool d’atteindre le sang. Fabriqué à partir de protéines de lactosérum, un dérivé du lait utilisé couramment dans les compléments alimentaires, il est enrichi avec des atomes de fer, des molécules de sucre et des nanoparticules d’or. Cette combinaison déclenche une réaction chimique qui transforme l’alcool en acide acétique inoffensif, un composé naturel bien toléré par l’organisme.
Là où ce procédé est particulièrement intéressant, c’est qu’il court-circuite totalement le foie, qui est normalement responsable de la dégradation de l’alcool. Habituellement, après consommation, il passe dans le sang où il atteint rapidement le cerveau et provoque ses effets bien connus : euphorie, désinhibition et ralentissement des réflexes. Ensuite, il est métabolisé par le foie en acétaldéhyde, une molécule toxique impliquée dans les dommages hépatiques et les cancers. Le problème, c’est que ce sous-produit est bien plus nocif que l’alcool lui-même et est également en grande partie responsable des symptômes de la gueule de bois. En neutralisant l’alcool avant qu’il ne soit transformé en acétaldéhyde, l’hydrogel offre une double protection : il limite l’intoxication immédiate et prévient les effets secondaires à long terme.
Des résultats impressionnants en laboratoire
Pour tester son efficacité, les chercheurs ont mené une série d’expériences sur des souris. Elles ont été nourries avec une dose d’hydrogel avant de recevoir une quantité importante d’alcool. Les résultats sont sans appel : une heure après l’ingestion, les souris ayant reçu l’hydrogel affichaient un taux d’alcoolémie inférieur de 40 % à celui des autres. Cinq heures plus tard, cet écart atteignait 56 %, prouvant que l’absorption avait été considérablement réduite.
Les différences ne s’arrêtent pas là. Les souris qui avaient consommé l’hydrogel se comportaient beaucoup mieux dans des tests cognitifs et moteurs. Là où leurs congénères alcoolisées montraient des signes évidents d’ivresse (perte d’équilibre et désorientation), celles qui avaient reçu l’hydrogel parvenaient à évoluer sans difficulté dans un labyrinthe.
Sur le long terme, les effets bénéfiques se sont également révélés spectaculaires. Les souris soumises à une consommation chronique d’alcool, mais protégées par l’hydrogel, n’ont pas développé les lésions hépatiques et les troubles intestinaux habituellement observés dans ce type d’expérience. Cela signifie que le gel prévient non seulement l’ivresse et la gueule de bois, mais il pourrait aussi offrir une protection contre les maladies liées à la consommation excessive de boissons alcoolisées.
Bientôt disponible pour les humains ?
Face à ces résultats prometteurs, la question évidente est : quand ce produit sera-t-il disponible pour le grand public ? Les chercheurs espèrent débuter des essais cliniques sur l’Homme dès que possible, mais plusieurs étapes réglementaires restent à franchir. Une fois validé, l’hydrogel pourrait être commercialisé sous forme de pâte comestible, à ingérer avant de consommer des breuvages alcoolisés.
Ce produit pourrait répondre à différents besoins. Certains l’envisagent comme un moyen de limiter l’ivresse sociale qui permet à ceux qui souhaitent boire sans perdre leurs capacités cognitives de mieux gérer leur consommation. Il pourrait aussi être utilisé pour prévenir la gueule de bois en empêchant l’accumulation d’acétaldéhyde dans l’organisme. Néanmoins, les chercheurs insistent surtout sur son potentiel thérapeutique : il pourrait être administré dans les hôpitaux pour aider les patients en état d’intoxication aiguë ou encore dans les centres de réhabilitation pour accompagner les personnes qui souffrent de dépendance.
Un remède miracle ou une fausse bonne idée ?
Si cet hydrogel suscite un enthousiasme légitime, certaines interrogations persistent. Son efficacité chez l’Homme devra être rigoureusement testée avant qu’il puisse être mis sur le marché. Il faudra également s’assurer qu’il n’interfère pas avec d’autres traitements médicamenteux et qu’il est bien toléré à long terme.
Une autre question se pose : un tel produit risque-t-il de banaliser la consommation de boissons alcoolisées ? Si les effets indésirables de l’alcool peuvent être réduits, certains pourraient en effet être tentés d’en consommer davantage en pensant qu’ils sont protégés. Or, cela reste une substance psychoactive aux effets multiples et l’hydrogel ne supprimera pas ses impacts sur le comportement ou la prise de décisions.
Malgré ces interrogations, cette avancée scientifique marque une véritable rupture dans notre manière d’aborder la consommation d’alcool. Si les essais cliniques confirment son efficacité et son innocuité, cet hydrogel pourrait bien devenir un outil incontournable pour limiter les méfaits des breuvages alcoolisés sur notre organisme. Un espoir pour la santé publique, mais aussi un produit qui pourrait soulever des débats éthiques et sociétaux s’il est mal utilisé.
Source : https://sciencepost.fr/