La Réunion fait face à une explosion du nombre de cas de chikungunya.
Deux personnes décédées à La Réunion, plus de 13.500 cas depuis août 2024 dont plus de 4.100 sur la seule semaine du 10 au 16 mars. L'épidémie de chikungunya sévit sur l'île, et ce n'est pas fini : le Dr Patrick Mavingui, directeur de recherche au CNRS, rattaché à l’Université de La Réunion, a prédit un premier pic épidémique en mai. Ce dernier prône d'une part la lutte antivectorielle – à savoir l'élimination des larves de moustiques porteurs du virus – et d'autre part la stratégie vaccinale.
La vaccination individuelle est en effet l'un des moyens de protéger la population dans son ensemble et d'atteindre ce qu'on appelle l'immunité collective. "C'est quand une grande partie de la population est immunisée contre un agent pathogène - en l'occurrence ici le virus du chikungunya - et que cette immunité empêche ou réduit la propagation du virus, explique à Outre-mer la 1ère Rachel Bellone, chargée de recherche en arbovirologie à l'Institut Pasteur. De cette manière, même si des personnes ne sont pas immunisées (c'est-à-dire pas vaccinées ou n'ayant pas été infectées par le passé), ces personnes seront protégées."
La métaphore de la forêt
Elle donne une métaphore très simple en comparant un risque d'épidémie à un incendie en forêt : "Le feu, c'est le virus. Les arbres, ce sont les individus d'une population. On a des arbres mouillés, ce sont les personnes immunisées. Le feu arrive sur 3, 4, 5 arbres mouillés et ainsi il ne peut pas se propager. Même si au centre, quelques arbres ne sont pas mouillés et risqueraient d'être brûlés, l'ensemble des arbres mouillés autour forme comme une espèce de bouclier pour empêcher la propagation."
Cette immunité collective est surtout importante pour les personnes vulnérables comme les nouveau-nés ou les immunodéprimés qui ne peuvent pas toujours se faire vacciner, car elles seront ainsi protégées.
17% à 20% de la population immunisée
Il existe deux façons d'être immunisé : l'immunisation naturelle, c'est-à-dire le fait d'avoir été infecté par un virus et d'en guérir ; et la vaccination. En ce qui concerne le chikungunya à La Réunion, 17% de la population est déjà immunisée contre le virus après avoir contracté la maladie en 2005-2006, selon le Dr Patrick Mavingui, 20% selon Santé publique France. Les recherches ont montré que cette immunité naturelle était durable.
Après la crise de 2005-2006, on estimait à 30% la part de la population réunionnaise infectée. Mais en 20 ans, la population a évolué, d’où la baisse du taux de cette immunité ne permettant pas d’atteindre actuellement l’immunité collective, précise le scientifique. Dans un autre média réunionnais, il détaille qu'il faudrait qu’entre 40 et 50 % de la population soit immunisée pour atteindre l'immunité collective.
On en est donc encore loin. C'est pour cette raison que la Haute autorité de santé prône à court terme la vaccination des seniors de plus de 65 ans, des adultes avec des comorbidités (hypertension artérielle, diabète, maladies cardiovasculaires, etc.) et des agents de lutte anti-moustique.
"Le vaccin disponible contre le chikungunya confère une immunité sur le long terme", assure Rachel Bellone en restant prudente. Ce type de sérum confère en général une immunité à vie mais comme il s'agit d'un tout nouveau vaccin, les scientifiques n'ont pas encore de vision à long terme.
Source : https://la1ere.francetvinfo.fr/